Philippe Joron
Université Paul-Valéry – Montpellier 3, France
philippe.joron@univ-montp3.fr
La souveraineté du Mal – Georges Bataille et l’innocence coupable de la littérature
The Sovereignty of Evil – Georges Bataille and the Innocence Guilty of Literature
Abstract : In his critical literature essay The literature and Evil (1957), Georges Bataille use a panoply of key ideas to justify the Sovereignty of Evil in literature and the sovereignty of literature through Evil. The aim of this paper is to show that these notions and alternative modes of thought were already present in various anterior philosophical, economical and political works, even mystical, and that they may therefore constitute the heuristic base of his sociology.
Keywords: Georges Bataille; Literature; Evil; Sovereignty; Otherness; Eroticism; Communication; Heterogeneity.
Dans La littérature et le mal, essai publié en 1957 reprenant un ensemble d’articles parus initialement dans la revue Critique, Georges Bataille (1897-1962) tisse une idée tourmentée et lancinante relative à la liberté d’être de chacun face aux impératifs qu’impose celle des autres. Largement explorée par la philosophie, cette ligne de pensée, charnelle à bien des égards, n’eut de cesse d’orienter sa vie et son œuvre. Cette liberté, voulue en état de déchainement, comprise comme souveraineté, est au centre de ses écarts philosophiques, de ses débordements sociologiques, de ses émargements anthropologiques et bien entendu, de ses épanchements littéraires qui n’hésitèrent guère à pratiquer la pornographie, la scatologie et la dépravation pour signifier l’essence même du lien social qui épuise ses actes dans des imaginaires de toutes sortes, les plus scandaleux soient-ils.
Trois perspectives se dégagent à la lecture de cette étude, lesquelles permettent de l’appréhender selon autant de paliers d’analyse. A première vue, il s’agit ni plus ni moins d’un essai de critique littéraire appliquée à quelques œuvres et vies d’auteurs qui traduisirent cette problématique de la liberté en une confrontation soutenue avec le Mal, avec cette extériorisation inventée de toute pièce d’un nous-mêmes en butte avec des préceptes moraux qui le tiennent et lui assurent ainsi un certain maintien. L’attention se porte ainsi sur huit écrivains qui donnèrent corps selon Bataille à cette liberté coupable : Emilie Brontë, Charles Baudelaire, Jules Michelet, William Blake, Donatien de Sade, Marcel Proust, Franz Kafka, Jean Genet. Il s’agit ensuite d’un essai en mode miroir sur la propre production littéraire de son auteur, dont une partie fut publiée clandestinement et sous des pseudonymes divers[1]. Enfin, dans une troisième gradation d’essai, c’est encore pour lui l’occasion d’explorer le déchainement du réel dans la fiction, d’examiner les nodosités du lien établi entre l’idée d’un Mal générique et celle d’une Littérature souveraine, de montrer l’excroissance sociologique de l’œuvre littéraire relevant d’un tel registre, au-delà des seules méandres psychologiques qui sous-tendraient une possible communication entre producteur et récepteur.
Je m’abstiendrai d’aborder ici les deux premières dimensions de l’essai dont il est question : celle, visible, de l’analyse critique appliquée aux œuvres en jeu ou aux commentaires qui en furent proposés ; et celle, cachée, de l’introspection littéraire et personnelle. Je m’en tiendrai seulement à la troisième, qui n’en est pas moins ample : celle qui condense en quelque sorte toute la sociologie bataillienne en un précipité de notions-clés renvoyant les unes aux autres. En effet, au même titre que son étude sur l’érotisme publiée la même année[2], La littérature et le mal doit aussi se comprendre à la lumière des lignes de force, mais aussi des fissures et fractures (épistémologiques ou thématiques), qui constituèrent l’appareil critique de sa sociologie dans la seconde moitié de sa vie.
L’auteur introduit son propos en quatrième de couverture (premier contact avec le lecteur qui manipule l’objet livre) par une Prière d’insérer qui sert en quelque sorte d’avertissement en délimitant le périmètre de la différence entre l’animal et l’homme, à partir de l’obligation pour ce dernier d’observer des prescriptions de règles qui assurent une ligne de conduite et des interdits qui servent de repoussoirs[3]. Si ceux-ci s’imposent en premier lieu comme des frontières à l’intérieur desquelles le social cherche à s’organiser et donc à ne point sombrer dans une dissolution fatale pour sa pérennisation, ils restent cependant ambigus, puisqu’ils renvoient également à l’obligation faite à l’homme de les transgresser, de les violer, d’en arpenter les voies prohibées. En sorte que cette transgression ne traduit pas une ignorance de la part de celui qui y succombe mais davantage une forme de courage. Ainsi, comme l’affirme Bataille dans cette même Prière d’insérer, « le courage nécessaire à la transgression est pour l’homme un accomplissement » que l’on retrouve dans la vie en général, l’expérience festive[4], la révolte politique, l’activité érotique, le rire, la mise à mal, la mise à mort, mais encore dans la littérature, et plus singulièrement dans la poésie, qui manipule sans cesse la circularité du saisissement et du dessaisissement dans l’invention du Mal, c’est-à-dire aux abords de sa découverte et à l’invite de ses chemins de traverse. Le Mal est essentiellement défi envers la mort qui attire et étire la vie à tout rompre.
A ce titre, l’écrivain a connaissance de sa culpabilité et « il peut revendiquer la jouissance d’une fièvre, qui est un signe d’élection »[5]. La littérature est ainsi l’un des lieux d’expression privilégiés de la polymorphie et de la duplicité du Mal. Elle est au moins un purgatoire pour l’homme qui joue à l’apprenti sorcier, au plus un bout d’enfer qu’il vit par procuration, sans doute encore un acte de purge pour l’écrivain, pour celui qui commet l’écriture et s’y compromet.
A propos de cet acte de purge, on peut ici rappeler l’analyse entamée par Georges Bataille avec le psychanalyste Adrien Borel au milieu des années 1920. Histoire de l’œil, paru en 1928 sous le pseudonyme de Lord Auch, est en quelque sorte l’aboutissement littéraire de cette analyse consistant à transformer en œuvre fictionnelle la violence intérieure du patient. Ce fut aussi pour lui l’occasion de prendre connaissance des photographies du « Supplice des cent morceaux » qui figèrent l’insupportable rencontre de la souffrance et de l’extase[6].
Une belle définition à l’emporte-pièce de Georges Bataille, cependant absente de l’essai en question, peut nous aider à débroussailler le terrain de la souveraineté du Mal en littérature, c’est-à-dire en reflet d’existence : « l’homme est ce qui lui manque »[7]. La formule peut surprendre. Elle semble renvoyer indirectement à sa lecture de la phénoménologie hégélienne selon laquelle les hommes, les sociétés, avancent par négations successives de leurs conditions présentes et par une recherche acharnée de ce qui pourrait les élaborer davantage[8]. Alexandre Kojève comprenait un tel mouvement de la manière suivante : « tant que l’Homme ne prend pas conscience de sa nouvelle situation dans le Monde en la comparant à l’ancienne, il ne peut pas non plus voir la contradiction (c’est-à-dire la Négation) qu’elle implique ; il ne pourra donc pas la nier par son action, et ainsi son action en elle ne sera pas vraiment humaine ou historique. […] Or l’Histoire est une Révolution permanente, puisqu’elle progresse par négations du donné social[9]. » L’homme est en effet ce qui lui fait défaut, constitué de ce qu’il n’est pas ou n’est plus, de ce qu’il n’a pas ou ne devrait pas posséder, de ce qu’il ne connaît pas ou craint de savoir sur lui-même et le monde[10]. Il est ainsi ce qui pourrait le perdre et c’est pourtant cet inconnu qui lui ouvre quelques portes de salut pour qu’enfin il s’accepte dans toute son entièreté, c’est-à-dire dans sa totale incomplétude. Ainsi, le monde de l’hétérogénéité et du sacré, de la communication forte et de la souveraineté, le monde de la liberté en somme, est en tout point éloigné de l’idée même de projet, lequel fonde la séparation du sujet et de l’objet (l’autre, l’animal, la nature) en une relation unilatérale de servilité et d’aliénation qui, à échéance, pourrait se retourner sur elle-même. Ce monde de l’hétérogénéité est au contraire le lieu d’expression de ce que Bataille appelle la « négativité sans emploi[11] », c’est-à-dire l’acceptation d’un destin, ou celle des aléas de la vie, propulsée par un grand « OUI » à l’existence. Il s’agit d’un univers que nous croisons par intermittence du coin de l’œil et qui se rappelle toujours à nous, avec insistance. Il insuffle alors en nous le saisissement, le choc, par la provocation de contenus qui perturbent, et nous pousse ainsi au dessaisissement de nous-mêmes, à la défection de notre propre maîtrise. Sans l’ombre d’un doute, cette conception-là tient un rôle central dans la philosophie bataillienne, qui se veut encore sociologie sacrée. Par voie de conséquence, elle irradie toute l’œuvre littéraire de son auteur et oriente le regard que ce dernier porte sur la littérature en général et la poésie en particulier. Ainsi, dans sa préface à la deuxième édition du recueil de textes constituant La Haine de la poésie, devenu L’Impossible, Georges Bataille scinde la condition humaine en deux ordres de possibilité : « Il y a devant l’espèce humaine une double perspective : d’une part, celle du plaisir violent, de l’horreur et de la mort – exactement celle de la poésie – et, en sens opposé, celle de la science ou du monde réel de l’utilité[12]. » Cette affirmation fait écho à la thèse émise en 1933 dans « La Notion de dépense »[13] à propos du principe de la perte, thèse qui dresse encore une ligne de partage entre le monde de l’homogénéité, de la productivité et de l’utilité (économique, scientifique, morale) et celui de leurs dynamiques contraires.
Une telle conception de la vie, qu’elle soit mondaine, sociale ou intellectuelle, à l’épreuve de maints exemples tirés de l’expérience, avait orienté l’ensemble des conférences prononcées par Georges Bataille entre 1937 et 1939 dans le cadre du Collège de sociologie. Elle fit ensuite l’objet d’une refonte heuristique, sous l’égide d’une attention toute particulière prêtée aux thématiques de l’énergie et de la consumation. C’est en effet en 1949 que paraît La Part maudite[14], ce précis d’économie générale aux atours politiques et sociologiques dans lequel il conditionne les activités humaines à l’utilisation d’une énergie vitale, selon deux orientations : capitaliser ou dépenser. A l’instar d’autres organismes vivants, l’espèce humaine utilise une partie de cette énergie pour s’accroitre, se maintenir et se pérenniser. Mais elle ne saurait l’absorber toute entière pour ces seuls accomplissements. Il lui faut alors en brûler l’excédent dans des activités non productives, jugées inutiles, déviantes ou immorales : l’art, la guerre, le jeu, la littérature, la fête, l’érotisme, le sacré. Dans La littérature et le mal, Georges Bataille reprend cette thématique de l’énergie en l’appliquant à l’œuvre poétique et picturale de William Blake qui, avec constance, mina les échafauds de la raison et de la moralité pour porter au plus loin son désir de liberté que d’aucuns pourraient convertir en folie : « l’homme de la moralité condamne l’énergie qui lui manque. L’humanité devait sans nul doute en passer par lui. D’où aurait-elle tirer la viabilité si elle n’avait dénoncé un excès d’énergie qui la trouble ; en d’autres termes : si le nombre de ceux qui manquaient d’énergie n’avait ramené à la raison ceux qui en eurent trop. Mais la nécessité de la mise au pas appelle à la fin le retour à la naïveté[15]. » Cette dépense d’énergie en littérature, libérant des contenus peu recommandables, est alors synonyme pour Bataille d’« enfance enfin retrouvée »[16], de retour à « la simplicité perdue »[17].
D’autres notions, tout aussi essentielles que celles précédemment énoncées, peuvent encore nous aider à saisir le système de déconstruction auquel se livre Georges Bataille dans toute son œuvre, un système heuristique qu’il aurait souhaité formaliser dans une sorte de programme de pensée cependant laissé à l’état d’ébauche ou de friche : l’hétérologie, dont Francis Marmande nous dit qu’elle « se donne pour la pensée des corps étrangers[18] » et qui correspondrait, selon les mots de Bataille, à la « science de ce qui est tout autre[19]. » Elle est ainsi la science des éléments hétérogènes, expurgés par les sociétés modernes, lesquelles sont bien entendu comprises comme expressions du monde de l’homogénéité. Elle correspond donc à un domaine de pensée subversif qui se propose non seulement de donner à voir ce qui est laissé pour compte – la vie improductive – mais aussi d’apporter un ordre de compréhension à l’ensemble de ces phénomènes dont l’activité sérieuse des hommes ne tient aucun compte, bien qu’ils la constituent pourtant. Elle est en définitive la science de la part maudite[20].
Georges Bataille introduit cette science dans un texte d’avant-guerre intitulé « La valeur d’usage de D.A.F. de Sade », à partir d’une distinction naturelle, plus exactement organique, entre ce qui relève de l’appropriation comme activité liminaire du processus physiologique et ce que résume l’excrétion en tant qu’aboutissement résiduel de cette première activité : « La notion de corps étranger (hétérogène) permet de marquer l’identité élémentaire subjective des excréments (sperme, menstrues, urine, matières fécales) et de tout ce qui a pu être regardé comme sacré, divin ou merveilleux[21]. » En métaphore, individu et société produisent et consomment un certain nombre de nourritures – spirituelles et matérielles – nécessaires à la manutention d’un équilibre propre, mais il arrive parfois que cette consommation soit commandée par l’attrait d’un « tumulte physiologique » susceptible de désorganiser momentanément ou de manière irréversible l’organisation minimale propre au maintien de la vie. Georges Bataille resserre son propos de la manière suivante : « le processus d’appropriation se caractérise ainsi par une homogénéité (équilibre statique) de l’auteur de l’appropriation et des objets comme résultat final alors que l’excrétion se présente comme le résultat d’une hétérogénéité de plus en plus grande en libérant des impulsions dont l’ambivalence est de plus en plus accusée[22]. » Ces données métaboliques servent pour ainsi dire de prétexte à ce que Georges Bataille développera dans les pages suivantes de son texte comme une sorte de manifeste politique qui donnerait tout son sens au fait de pouvoir lier « le développement pratique de l’hétérologie au renversement de l’ordre établi »[23]. Au-delà de cette intention dilapidatrice et vindicative qui s’accroche nécessairement au contexte historique qui l’a vu surgir, il est intéressant de souligner ici la symbolique qui est mise en jeu pour annoncer, dans l’optique bataillienne, l’irréductibilité des faits de dépense au creux de la vie sociale.
Toute production ou sécrétion corporelle est ainsi comprise comme une donnée hétérogène, comme une substance étrangère à l’homogénéité du corps et en tant que telle, après évacuation, il lui faudra subir tout un processus de transformation complexe avant de pouvoir réintégrer ou reconquérir un statut d’élément indispensable à la manutention de la vie. Cela fait inévitablement penser à ces symboles catamorphes dont Gilbert Durand trace le relevé selon qu’ils s’inscrivent dans la chute et l’intimité de la chair, dans un rapport au temps qui, inévitablement, ne saurait être appréhendé sans angoisse : « La chair, cet animal qui vit en nous, ramène toujours à la méditation du temps. Et lorsque la mort et le temps seront refusés ou combattus au nom d’un désir polémique d’éternité, la chair sous toutes ses formes, spécialement la chair menstruelle qu’est la féminité, sera redoutée et réprouvée en tant qu’alliée secrète de la temporalité et de la mort[24]. » C’est en tout et pour tout un horizon symbolique de la condamnation morale qui se dessine à l’aune de toutes les affaires humaines ; horizon auquel se greffe l’obsession du lavement et de la purification. Cela concerne également l’activité excrémentielle, même si comme le fait remarquer Gilbert Durand celle-ci n’a pas toujours été dévalorisée, même si encore certaines sociétés lui accordaient ou lui attribuent encore « un rôle thérapeutique ou cosmétique[25] » qui n’est en rien secondaire, au même titre sans doute que l’enfant dont aussi bien la découverte de son anatomie que les jeux auquel cela donne lieu, notamment avec la matière, sont constitutifs de son développement : « pour l’enfant la défécation est le modèle même de la production et l’excrément est valorisé parce que premier produit créé par l’homme »[26]. Cette dernière observation du maître des images revêt énormément d’importance pour l’optique qui nous occupe ici. Sans pour autant aller plus loin dans le sens d’une herméneutique axée sur les images et les symboliques que cela recouvre, on peut néanmoins accorder du crédit à l’établissement d’un parallèle entre ce type de production organique consommée dans un certain nombre d’expériences jugés subversives qu’ajuste l’individu sur lui-même et un autre type de production, à la fois économique et philosophique, qu’englobe l’ensemble des activités sociales.
En termes d’hétérologie sociologique, l’effervescence littéraire ou poétique, comme toute autre activité improductive d’ailleurs, s’assimile parfaitement à ces données hétérogènes irréductibles que l’homogénéité du corps social ne saurait souffrir sans une certaine gêne, sans une perturbation plus ou moins accentué de ses fonctions vitales, bien qu’il les lui faut vivre absolument. De toute évidence, la littérature ne change pas le monde, d’où son inutilité, mais elle en restitue la part d’ombre en jouant sur les perspectives et permet ainsi d’assouvir en partie un irrémédiable besoin d’imagination. On pourrait dire cela avec le vert langage de l’hétérologien : « en dernière analyse il est clair qu’un ouvrier travaille pour se procurer la satisfaction violente du coït (c’est-à-dire qu’il accumule pour dépenser)[27]. » En somme, tout comme le singulier se nourrit du plusieurs, l’homogène ne saurait exister sans nombre de composantes hétérogènes qui participent de sa mise en corps, de son fonctionnement et donc de son unité vitale.
Dans La littérature et le mal, Georges Bataille rappelle cette dichotomie qui nous fonde entre homogénéité et hétérogénéité, qui fut exprimée initialement dans un texte de 1933 sur la notion de dépense. Selon lui, l’humanité poursuit deux finalités dont l’une, négative, consiste à conserver la vie (éviter ou repousser la mort) alors que l’autre, positive, s’astreint à en accroitre l’intensité. Cela renvoie donc à la dualité Durée / Intensité. Si la Durée peut être définie comme le Bien, l’Intensité l’est alors en tant que Valeur. Cette Valeur se situe par delà le Bien et le Mal. D’où chez Bataille l’instauration d’une hypermorale ou peut-être, pour reprendre ici le titre d’une étude du philosophe Jean-Marie Guyau, une « esquisse d’une morale sans obligation ni sanction »[28]. Pour autant, il s’agit davantage d’une morale qui sait la culpabilité et qui s’efforce de la vivre.
La littérature manipule le Mal dans sa signification ontologique, en tant que fondement de l’être. Elle joue avec des objets, des êtres, des situations de répulsion qui pourtant ne cessent de nous attirer. Bataille réamorce son propos à l’aide de deux concepts-forces déjà formalisés dans le cadre de ses interventions au sein du Collège de sociologie sacrée : le noyau social et l’interattraction humaine[29]. Le noyau social se comprend comme un ensemble d’objets, de croyances, d’êtres, de lieux, de pratiques ayant un caractère sacré, c’est-à-dire séparé du continuum de la vie profane. Il renvoie donc, par exemple, à la victime expiatoire, au sang, aux menstrues, au crime, ou encore aux excréments dont il a déjà été question. De fait, le noyau social est essentiellement tabou, objet d’une répulsion fondamentale : une répulsion commune qui consolide cependant le lien entre les individus. A ce titre, le dégout, la terreur, l’horreur servent de liant en ayant pour objets de focalisation tout ce qui a trait au sexe et à la mort. Ce sont là des éléments hétérogènes qui attirent, qui fascinent, qui agglutinent, dont le caractère sacré est indiscutable. Le sacré est alors ici « la transformation de contenus dépressifs en objets d’exaltation »[30]. La répulsion entraine donc l’attraction, alors que la dépression provoque l’excitation. Inévitablement, en fonction de ce qui vient d’être avancé, l’interattraction humaine se fait plus intense autour de ce noyau social et sacré. Entendue comme sensibilité tropique qui provoque la liaison des individus entre eux, elle permet à Georges Bataille d’explorer plus avant le « ressort essentiel de la machinerie humaine[31] » qui provoque des formes de grégarisme autour d’un noyau commun fait de représentations, de pratiques, d’intentions et de pulsions, d’objets et d’êtres sur lesquels elles s’actualisent. Sous couvert d’une immédiateté presque exclusivement instinctuelle, l’interattraction humaine ne peut exister socialement que par la médiation d’un ensemble de repères distinctifs ou plus précisément, en fonction de son passage obligé au contenu sacré du « noyau social », ce qui la distingue de celle des animaux chez qui on ne saurait naturellement trouver de référence au sacré : « L’interattraction humaine n’est pas immédiate, elle est dans le sens précis du mot médiatisée, c’est à dire que les rapports de deux hommes entre eux sont profondément altérés du fait qu’ils sont situés l’un et l’autre dans l’orbite du noyau central : le contenu essentiellement terrifiant du noyau autour duquel l’existence de chacun d’eux gravite intervient dans une relation comme un moyen terme inévitable[32]. » La littérature, au même titre que la poésie et le sentiment religieux, peut dès lors se comprendre en tant que noyau social ou sacré, puisqu’elle ne cesse de nous « jeter hors de nous », dans des objets, des situations, des êtres qu’elle met en scène à la lumière du drame qui les noue. Elle est le Mal, ou « le Diable, qui est la pure essence de la poésie »[33]. Elle est encore « l’accord de l’homme avec son propre déchirement, à la fin son accord avec la mort, avec le mouvement qui l’y précipite »[34].
Toujours dans La littérature et le mal, Georges Bataille introduit deux autres notions en état de totale complémentarité, celles de souveraineté et de communication : « la littérature est communication. Elle part d’un auteur souverain, par-delà les servitudes d’un lecteur isolé, elle s’adresse à l’humanité souveraine[35]. » Selon le commentaire qu’en fait Mario Perniola dans L’instant éternel, ce type de communication est le contraire de l’échange, lequel est la base des rapports économiques et du langage utilitaire[36]. Pour Bataille, elle est le débordement d’une hétérogénéité irréductible : « la communication majeure ne peut se faire qu’à une condition, que nous recourrions au Mal, c’est-à-dire à la violation de l’interdit[37]. » Pour cela, il nous faut dramatiser. La littérature doit faire vivre le Drame. Sans Drame nous ne saurions « sortir de nous mêmes » et communiquer avec un hors de soi insaisissable. Ainsi, « la communication est le contraire de la chose, qui se définit par l’isolement qu’il est possible d’en faire »[38]. Elle est souveraine, authentique ou majeure à condition de ne pas être servile ou subordonnée. Faire œuvre littéraire est une opération souveraine qui mise sur une communication majeure mettant en jeu le sacré, c’est-à-dire des objets de répulsions (le sexe, la mort) qui brisent l’isolement de l’être.
Pour le dire autrement, ce faisceau de perspectives à pour cible la question de la souveraineté : dans l’art, la poésie, la littérature, dans la relation qui unit l’acte de création et celui de réception rétrocédant en retour des émotions, mais aussi dans la société existentielle, la religion, la guerre, l’érotisme, la fête, la vie quotidienne, bref dans ces formes de vie sociale qui expérimentent à chaque instant la dépense improductive dont le sacré est parti prenante. Souveraineté, mais par rapport à quoi ? A ce que Georges Bataille appelle la vie productive, l’homogénéité ou sphère de l’activité : comme l’explique Philippe Audoin, commentant ici la critique bataillienne du monde moderne, de son idéologie et de ceux qui la portent, « ce qui n’est pas souverain est défini comme servile, ou subordonné. Sont tels les comportements qui sont liés à un projet, qui s’asservissent à l’obtention d’un résultat, et dont l’ultime raison est, en fin de compte, de sauvegarder, d’accroître, de perpétuer l’individu, les siens, l’espèce »[39]. La position situationniste de Guy Debord, quoique postérieure au bornage bataillien, donne d’ailleurs une idée assez précise de ce mouvement, qualifié de fulgurant par Georges Bataille, contenu dans l’approche de la souveraineté par l’art, par la vie comme forme d’art : « L’art peut cesser d’être un rapport sur les sensations pour devenir une organisation directe de sensations supérieures. Il s’agit de produire nous-mêmes, et non des choses qui nous asservissent. […] Il faut mener à leur destruction extrême toutes les formes de pseudo-communication, pour parvenir un jour à une communication réelle directe[40]. » Cette affirmation debordienne, publiée dans le N°1 de l’Internationale Situationniste en juin 1958, fait écho en tout point à l’ancrage bataillien de la communication souveraine exposé dans un article consacré à l’interprétation faite par Jean-Paul Sartre de l’œuvre de Jean Genet, paru dans la revue Critique, N° 65 et 66, en 1952. Dans cet article, qui deviendra postérieurement un chapitre de La littérature et le mal, Georges Bataille s’applique à établir une distinction entre la communication forte, qu’il conçoit comme souveraineté, et la communication faible qu’il assimile à une activité servile : « La communication forte est première, c’est un donné simple, apparence suprême de l’existence, qui se révèle à nous dans la multiplicité des consciences et dans leur communicabilité[41]. » Cette dualité communication forte / communication faible ou pour reprendre la dichotomie debordienne : communication réelle directe / pseudo-communication, s’applique à l’exploration du partage du monde, de l’existence entre sacré et profane, entre souveraineté et subordination, entre consumation et consommation, entre communion et isolement.
Les littéraires savent fort bien qu’il existe une dimension érotique dans l’acte de création, qui met en œuvre un dessaisissement des êtres en liaison. D’abord un érotisme d’expression, celui du moyen qui sert à pourfendre le silence ou l’inertie : les mots, la syntaxe, le rythme. Mais aussi l’objet tactile grâce auquel s’imprime la trace : stylo, clavier, papier, écran. Ensuite un érotisme de rapport ou de lien, aussi fugace fût-il, avec celles ou ceux auxquels on destine l’œuvre. Cette espèce d’érotisme-là est d’autant plus intense qu’elle joue avec la découverte de l’autre, entre exhibition assumée et effeuillage négocié. Sur un registre tout à la fois charnel et mystique, Bataille entrevoyait trois formes d’érotisme : l’érotisme des corps, l’érotisme des cœurs et l’érotisme sacré qui enveloppe les deux premiers[42]. L’érotisme, en tant que Valeur, se définit avant tout dans son opposition à la reproduction sexuée, entendue comme Durée. Il fait alors office, entre autres objets de répulsion transgressifs, de noyau sacré donnant accès à un état de continuité avec l’autre, les autres, le donné mondain. Avec ce que Bataille comprenait encore comme étant l’intimité perdue. Appliqué à la littérature souveraine et à l’instar des corps qui se croisent, s’effleurent, s’affrontent, se mêlent parfois, s’évitent aussi, l’érotisme provoque une esthétique commune, c’est-à-dire le fait de ressentir ensemble une émotion, des sensations mises en partage. Mais plus encore qu’une esthétique à l’œuvre, il est le lieu d’épanchement d’une cœnesthésie nous ouvrant à la sensation pleine de notre existence. L’érotisme littéraire est sans doute un corps à corps différé entre auteur(s) et lecteur(s), fait de productions et de réceptions solitaires, sans que ne soit pour autant mis en acte ce qu’Hannah Arendt dénommait « l’esseulement », désolation d’un soi veuf de toute espèce de duplicité[43].
J’ai indiqué plus haut que Bataille définissait l’homme en fonction de ce qui lui manquait. Cela renvoie indubitablement à la problématique de l’altérité, à ce qu’il comprenait également comme une « différence non explicable »[44]. Nous ne sommes pas définis une fois pour toutes. La duplicité creuse sans cesse le sillon de nos diverses tentatives d’identification, en acte ou par procuration, qui nous rapproche d’un sentiment de complétude en échappatoire. Dans La part du Diable, Michel Maffesoli indique bien ce champ des possibilités en état d’expérimentation qui envisage le vitalisme social dans l’accès à l’Autre : « être travaillé par le manque ne peut que favoriser la recherche, en moi-même, dans le social, la nature, la déité, de l’Autre qui, pour un moment et imparfaitement, me complète[45]. » Nous nous agitons dans des expériences qui nous construisent et nous subliment pour un temps donné, dans une recherche à plus soif de sensations nouvelles. Le spécialiste de la psyché humaine dirait sans doute que chacun de nous, à son niveau, en fonction de sa propre histoire mais aussi de ses propres déterminations existentielles, en fonction encore ou malgré de nombreuses contraintes (sociales, familiales, culturelles, économiques, etc.) qui alimentent le sens de la vie, chacun de nous donc convoque la nécessité d’expérimenter ce qui ne va pas de soi, ce qui n’est pas évident au prime abord. Nécessité de découvrir de nouveaux horizons de soi-même, nécessité également de s’ouvrir ou de se rendre perméable à ce qui est différent, c’est-à-dire aux autres, aux situations mondaines mais aussi à une part de soi-même que le polissage social tend à déconsidérer, ou à enfouir, ou à mettre entre parenthèses. Nous en revenons à la circularité du complexe saisissement / dessaisissement introduite plus haut. Pour se saisir d’une expérience nouvelle, ou des autres ou d’une parcelle de soi, encore faut-il se dessaisir de quelques conventions ou mises en conformité personnelles au regard des autres. En d’autres termes, il convient de se lâcher. Cette prise de risque-là suppose la prise en compte de soupapes de sécurité sans lesquelles se profile sans doute l’anéantissement de soi, des autres, d’un monde qui sert de support à la mise en œuvre des relations. Emile Cioran plaidait pour la conception de hurloirs[46], sorte de déversoirs à émotions, de comptoirs à expériences (l’art, la fête, le sport, la littérature en font partie). Ce que l’on pourrait encore appeler des expérimentoirs ou des laboratoires existentiels qui permettraient de jouer avec le feu sans risquer l’embrasement généralisé que provoquerait nécessairement leur absence. Peut-être convient-il alors de comprendre cette constante variable humaine, l’attrait du Mal, dans le cadre d’une altérologie constitutive[47] : une pensée sur l’autre qui s’altère, tout en altérant, mais qui désaltère également à grands coups d’altérité, face à la sécheresse du trop semblable, voire à l’aridité de l’identique. J’ai pu préciser ailleurs que cette altérologie, applicable à l’étude du social en acte et à celle de ses productions imaginaires, mais encore aux relations que la pensée établit avec ses terrains d’expression, prend en considération au moins quatre dimensions : la dépossession, la communion, la procuration, l’entiération[48], autres manières de signifier les mécanismes de l’accès à l’Autre.
Cette problématique de l’altérité altérante ou de l’altération qui complète et réalise l’homme, est au centre même de la littérature véritable ou souveraine. Dans sa conception du journalisme réaliste, Albert Londres disait qu’il convenait de « porter la plume dans la plaie », c’est-à-dire de mettre le curseur dans les pores du réel. Cela est aussi valable pour la littérature dont il est ici question, laquelle manipule, à bon escient et parfois à s’en mordre les doigts, les ingrédients hétérogènes de la Part maudite.
Bibliographie
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Notes
[1] Par exemple ceux de Lord Auch (Histoire de l’œil, 1928), Louis Trente (Le Petit, 1934) ou encore Pierre Angélique (Madame Edwarda, 1937).
[2] Georges Bataille, L’Erotisme, Paris, Editions de Minuit, 1957 ; Œuvres complètes, Tome X, Paris, Gallimard, 1987.
[3] Georges Bataille, La littérature et le mal, Paris, Gallimard, 1957 ; Œuvres complètes, Tome IX, Paris Gallimard, 1979.
[4] Voir à ce propos Jean-Jacques Wunemburger, La fête, le jeu et le sacré, Paris, Delage, 1977 ; Philippe Joron, La fête à pleins bords. Bayonne : fêtes de rien, soif d’absolu, Paris, CNRS Editions, 2012.
[7] Georges Bataille, « Ecrits posthumes 1922-1940 », Œuvres complètes, Tome II, Paris Gallimard, 1970, p. 419.
[8] G.W.F. Hegel, La phénoménologie de l’esprit, Tome I, Traduit par Jean Hyppolite, Paris, Aubier, Coll. « Philosophie de l’esprit », 1987 (1941).
[10] Cela renvoie également à la notion d’entièreté développée par Martin Heidegger. Voir Philippe Joron, La vie improductive. Georges Bataille et l’hétérologie sociologique, Montpellier PULM, 2010.
[12] Georges Bataille, L’Impossible (La Haine de la Poésie), Editions de Minuit, 1962 (1947) ; Œuvres complètes, Tome III, Paris, Gallimard, 1971, p. 102.
[13] Georges Bataille, « La Notion de dépense », La critique sociale, n° 7, janvier 1933, p. 7-15 ; Œuvres complètes, Tome I, Paris, Gallimard, 1970, p. 302-320.
[19] Georges Bataille, « La valeur d’usage de D.A.F. de Sade », Oeuvres complètes, Tome II, Paris, Gallimard, 1970, p. 61.
[21] Georges Bataille, « La valeur d’usage de D.A.F. de Sade », Oeuvres complètes, Tome II, p. 58-59.
[24] Gilbert Durand, Les structures anthropologiques de l’imaginaire, Paris, Dunod, 1984, p. 133-134.
[29] Georges Bataille, Collège de sociologie, Conférences du 22 janvier et du 5 février 1938, Œuvres complètes, Tome II, p. 311.
[40] Guy Debord, « Thèses sur la révolution culturelle », Internationale Situationniste, N°1, juin 1958. Voir également Jean-François Martos, Histoire de l’Internationale Situationniste, Gérard Lebovici, 1989.
[41] Georges Bataille, « Jean-Paul Sartre et l’impossible révolte de Jean Genet », in Critique, N° 65, octobre 1952, p. 819-832 et N° 66, novembre 1952, p. 946-961 ; La littérature et le mal, Œuvres complètes, Tome IX, p. 312.
[43] Hannah Arendt, La vie de l’esprit, Paris, PUF, 2005. Voir également Céline Ehrwain Nihan, Hannah Arend : une pensée de la crise, Genève, Labor et Fides, 2011.
[44] Georges Bataille, « La structure psychologique du fascisme », Œuvres Complètes, Tome I, Paris, Gallimard, 1970, p. 345.
[45] Michel Maffesoli, La part du Diable. Précis de subversion postmoderne, Paris, Flammarion, 2002, p. 117.