Efstratia Oktapoda
Université de Paris IV-Sorbonne, France
efstratia.oktapoda@paris-sorbonne.fr
D(é)crire son pays ailleurs.
Mythe et identité chez Ismaïl Kadaré[1]
Write and describe his country somewhere.
Myth and identity in Ismaïl Kadaré’s novels
Abstract: I shall try to schematize in this study the reception and the invention of the myths in the work of Ismaïl Kadaré from a mythopoetics and mythocriticism point of view. If we speak of mythopoetics in the work of Kadaré, it is not different from the appearance of tragic Greek, in particular from Aeschylus. Under pretext to open the wells of the abyss, Kadaré makes his heroes of the Hellenic and Balkan mythological fund go out, after such Prométhée was chained in the country of eagles. However, if the work of Kadaré is based on the legends and the Balkan myths and of antique Greece, its big merit is to have made resound the Balkans as ever before him. It leaves to the others the nonsense and makes a work which is not a description, but a symbol of the unspeakable experience of the totalitarianism.
Keywords: Greek and Balkan mythology; Ismail Kadaré; Mythopoetis; Myths; Prometheus; the Balkans; Totalitarianism.
Question d’actualité, le mythe, et son immersion dans la fiction, donne à ce début du troisième millénaire une importance extraordinaire dans le champ des études littéraires et comparées. Mythe, identité, mythe et identité, la relation surtout entre les deux notions mérite l’examen. Je proposerai ici de reprendre le terme de « mythopoétique » proposé par Pierre Brunel comme un prolongement de « mythocritique », pour envisager dans mon analyse de schématiser la réception et l’invention des mythes chez un écrivain des Balkans qui mérite, me semble-t-il, une étude particulière : Ismaïl Kadaré.
Le terme « mythocritique » est à l’origine enraciné dans la « psychologie des profondeurs », supplantant celui de « mythanalyse » lancé par Denis Rougemont[2]. « À la psychanalyse de Freud répondait la mythanalyse de Denis de Rougemont. Et à la psychocritique de Charles Mauron répond la mythocritique de Gilbert Durand », expliquait Pierre Brunel[3]. Sous l’égide de Pierre Brunel justement, la « mythocritique » a pris ses distances vis-à-vis de cet héritage et s’est imposée dans les études littéraires.
Dans son plus récent ouvrage consacré aux mythes, Pierre Brunel a choisi le titre Mythopoétique des genres (Brunel, 2003) empruntant le terme au grand comparatiste canadien Northrop Frye. Je n’ai pas de prétention théorique, et je n’ai pas l’intention de faire entendre ma voix dans ce vaste débat (mythocritique, mythanalyse, mythopoétique). Sans vouloir me perdre dans la poussière très fine des formes et des mythes littéraires, je retiendrai de l’analyse de Pierre Brunel sa tripartition générique, résolument aristotélicienne, entre Lyrisme, Epopée et Drame comme paradigme d’analyse de l’œuvre de mon écrivain, Ismaïl Kadaré. Ni lyre ni délire, plutôt épopée, drame et tragédie dans les Balkans sont les mots clés qui conviennent et qui traversent de long en large l’œuvre d’Ismaïl Kadaré.
Si mythopoétique il y a, dans l’œuvre de Kadaré, elle n’est pas différente du surgissement des tragiques grecs, notamment d’Eschyle. Sous prétexte d’ouvrir les puits de l’abîme, Kadaré fait sortir ses héros du fonds mythologique hellénique et balkanique qui n’est que le sien propre, tel un Prométhée enchaîné dans le pays des aigles.
Toute l’œuvre de Kadaré est fondée sur les légendes et les mythes balkaniques et de la Grèce ancienne. Au centre de cet univers se dresse Prométhée, premier rebelle et premier défenseur de l’homme. Désormais l’homme n’a plus besoin du feu, pour me référer à Eric Faye, ou plutôt a-t-il besoin d’un feu différent pour résister aux tyrans, celui de la connaissance. L’œuvre de Kadaré, son univers entier, tourne autour de l’homme. L’homme d’honneur, qui tient ses engagements et respecte la dignité de ses semblables, qui a encré dans son esprit un concept-clé venu des tréfonds de l’histoire albanaise : la bessa[4], la parole donnée, règle immuable des Albanais depuis tout temps. Un concept qui traverse son œuvre littéraire lui conférant une portée universelle.
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Le grand mérite de Kadaré est d’avoir voulu faire résonner les Balkans comme jamais avant lui. Il laisse à d’autres la déraison et fait une œuvre qui n’est pas une description, mais un symbole de l’expérience indicible du totalitarisme.
Dans l’Albanie stalinienne, si dans une salle de réunion on exprimait à haute voix une idée contre le régime, on était arrêté sur-le-champ par les autres participants qui vous bâillonnaient, puis vous déclaraient fou, ou agent à la solde de l’étranger tentant de déclencher une rébellion armée, ce qui signifiait le peloton d’exécution. Dans ces conditions, la seule résistance possible pour l’écrivain, était la littérature. La vraie littérature, libre, identique à celle qui aurait existé en l’absence de la dictature.
« Je ne me suis jamais qualifié de dissident. La littérature me suffit. J’ai toujours formulé les choses de la même manière : j’ai essayé de produire une littérature normale dans un pays anormal »[5].
Dans l’Albanie dictatoriale d’Enver Hoxha, « le sultan rouge », antioccidentale et antieuropéenne, Kadaré l’homme, Kadaré l’écrivain, est obligé de prendre la fuite. « [S]’il était vrai qu’ils ne pouvaient pas m’emprisonner, cela ne les empêchait nullement de me faire disparaître accidentellement. C’était même désormais leur unique solution »[6]. À la suite des accusations à cause des Pachas rouges, l’auteur déclare : « Dans la lutte contre l’État, j’étais vaincu »[7].
L’histoire du fils de Mehmet Shehu est véritablement stupéfiante. Le fils du Premier ministre albanais condamné, l’écrivain Bashkim Shehu, évoque son calvaire dans le livre L’Automne de la peur (1993). Ses dialogues avec le juge dans les bureaux de l’instruction sous la torture psychologique étaient retransmis par magnétophones et haut-parleurs dans des salles bien remplies, principalement d’intellectuels. Kadaré qui fut présent lors d’une de ces assemblées écoute à un moment son nom. En effet, Helena, son épouse et lui, avaient en maintes reprises parlé du régime avec Bashkim Shehu et sa femme, et dans des termes qui les mettaient en danger. À cette époque, Kadaré était publié dans quasiment toute l’Europe, tout comme aux États-Unis et au Canada. Un écrivain publié et apprécié par la ‘bourgeoisie internationale’ ne pouvait être que douteux pour les communistes du Parti.
En 1990, Kadaré part en exil, ou plutôt, à l’instar de Thomas Mann, ne revient pas d’un voyage à l’étranger.
Exilé, l’auteur parle d’Eschyle, exilé volontaire comme lui d’il y a vingt-cinq siècles, et d’Ovide, exilé contraint d’il y a vingt siècles.
Adoré à l’Occident, symbole ou agent, l’auteur est vu comme espion dans son pays. « [D]ans l’Albanie communiste, les hommes célèbres, et surtout les écrivains, d’une façon ou d’une autre, devaient se sentir coupables », avoue l’auteur. Et pour cette culpabilité, ils devaient payer un tribut : le tribut de l’écrivain connu. Avec la reconnaissance internationale s’ajoutait pour moi une nouvelle charge ! le tribut de l’écrivain mondialement connu. Dorénavant je devrais payer deux fois plus que les autres »[8]. Et à l’auteur d’affirmer : « Tout sang versé comporte son poids tragique, mais dans les Balkans, et particulièrement en Albanie, il est considéré indélébile pour des siècles »[9].
En exaltant les mythes, Kadaré donne à ses œuvres une portée symbolique. Au-delà du temps et de l’espace bien précis de son Albanie natale, l’auteur crée un univers symbolique au paradigme vertical ; un empire profond et vaste selon l’ancienne prose balkanique. Faisant œuvre intemporelle, l’auteur fait preuve de cette volonté délibérée de se placer hors du temps classique. Il met au centre de ses œuvres le thème de l’absence et le rôle prépondérant des fantômes dans les mythologies.
Mythes, images, symboles, pour me référer à Eliade « l’homme moderne retrouve les positions archétypales »[10]. Les œuvres de Kadaré s’interpénètrent par des greffes mythologiques. Le général de l’armée morte[11], le père de Katrina dans Noces ou encore Hadji Milet qui conduit la caravane des feredjés dans Invitation à un concert officiel et autres récits, ce sont des archétypes qui concourent à créer l’univers Kadaré.
Les archétypes humains peuplent les romans de Kadaré qui ont ceci en commun : jouer un rôle par rapport à un centre immuable : l’Événement. Histoire événementielle ou Histoire tout court, dans les pays communistes, même les destins sont collectivisés. « Personne n’échappe à la machine », déclare Kadaré aux journalistes après sa défection en France.
Écrivain francophile et francophone, pour me référer à mon ouvrage sur Le multiculturalisme dans les Balkans[12], mais avant tout écrivain national, dans la brume et le froid qui caractérise son écriture romanesque, Ismaïl Kadaré s’est assigné la tâche de transmettre l’histoire de son pays aux générations futures. Entre exil et souvenir, errant son âme sur les routes de Paris, l’auteur fait penser à un certain général, transportant sur les routes de l’Albanie, les cendres d’une armée morte et de son cher pays.
Ce qui caractérise l’univers kadaréen est sa vision tragique. L’écrivain qui a vécu pendant des longues années au centre de la dictature, a rédigé deux romans terribles, La niche de la honte et Le palais des rêves. Sa vision sur le totalitarisme est des plus noires qui soit dans la peinture de l’Enfer, autre élément clé des romans kadaréens. Elle ne laisse pas la moindre place à la liberté et à la résistance. Kadaré décrit comment on fait taire une langue, comment on éteint une culture, comment on inocule l’oubli à des populations entières. Écrivain rebelle, Kadaré a osé de publier ces romans à quelques centaines de mètres du siège de la plus dure dictature européenne depuis la mort de Staline.
Il sentait au plus profond de lui que la Grèce continuait de peser de tout son poids sur son dos, et il aurait beau éculer de rage, secouer les épaules avec fureur, il ne parviendrait jamais à s’en libérer. Il portrait la Grèce et la Grèce le portrait ». En substituant un seul mot, Albanie à la Grèce, Ismaïl Kadaré, au lieu de parler d’Eschyle en exil, pourrait décrire sa propre condition. En choisissant de quitter son pays en octobre 1990, l’écrivain albanais s’est de nouveau trouvé sur les traces d’Eschyle. Rarement écrivain a plongé aussi profondément dans la nuit des temps ‒ deux mille cinq cents ans ‒ pour trouver son porte-parole, son porte-feu[13].
Faisant du passé un présent éternel, l’auteur s’est ancré sur les mythes fondateurs et en particulier sur Eschyle et Homère. Substrat de l’aventure humaine, le mythe contribue à « délivrer l’homme moderne de son provincialisme culturel »[14], historique ou géographique pour lui donner « une nouvelle dimension existentielle »[15] (45).
Dans l’univers kadaréen, l’individu est écrasé, semé de problèmes et de chagrins. Le plus souvent militant, aux pseudonymes mythiques, Spartacus, Antée ou Prométhée, il retrouve sa force de vivre et d’agir au contact de la terre natale. Jeu et trajet de l’histoire vécue, le récit kadaréen se veut la transposition poétique de la réalité, la transfiguration fictive de l’individualité.
Si l’on voulait maintenant codifier l’œuvre de Kadaré, trois sont les catégories qui le traversent : les œuvres transnationales et éternelles, les œuvres autobiographiques, et les œuvres temporelles fondées sur l’histoire récente de l’Albanie.
Dans la première catégorie appartiennent les œuvres qui se réfèrent à la Grèce ancienne, au Moyen-Âge balkanique et à l’empire ottoman. De ces ères historico-culturelles, l’auteur puise mythes, légendes et ballades qu’il actualise en les transposant au XXe siècle. C’est l’univers kadaréen qui a donné naissance à ce qu’on peut désormais appeler les « œuvres éternelles » : Qui a ramené Doruntine ?, Le pont aux trois arches, Avril brisé, tout comme son essai Eschyle ou l’éternel perdant[16]. Des œuvres antiques se réincarnent dans Les tambours de la pluie ou Le grand hiver mais aussi Eschyle, le roi des Perses qui prend la voix de l’auteur pour expliquer comment deux mille cinq ans plus tard, un petit peuple peut tenir tête à des grands empires. L’empire perse s’appelle chez Kadaré l’Union soviétique ou la Chine de Mao. En bon adepte de l’éternel retour nietzschéen, Kadaré montre que le temps est une noria puisant dans les nappes du passé pour irriguer le présent. Grâce à cette noria, la Grèce ancienne et le Moyen-Âge balkanique traversent l’œuvre de Kadaré. Dans Le grand hiver, en faisant fondre la mythologie grecque et la mythologie chrétienne, l’auteur obtient un mythe hybride qui témoigne son attachement aux valeurs de l’Occident gréco-chrétien plus qu’à l’Orient et à l’islam qui fut pourtant la religion dominante d’Albanie jusqu’à la fermeture des lieux de culte en 1967.
Dans une deuxième catégorie on peut classer les œuvres qui puisent sur la propre vie de l’écrivain. Chronique de la ville de pierre et Le crépuscule des dieux de la steppe, ce sont des œuvres autobiographiques ‒ le premier correspond à l’enfance, le deuxième à la période étudiante à l’Union soviétique. La chronique est celle de la découverte de tout ce qui a fait Ismaïl un Kadaré : le tragique et le magique, l’apprentissage de la lecture et la collision frontale avec les chefs d’œuvre de la littérature mondiale (Macbeth). Matière première de son œuvre, la pierre, comme Gjirokastër, sa ville natale. Ponts de pierre, montagnes dévêtues, plateaux poncés par le vent parsèment son œuvre tout comme les mythes glanés pendant l’enfance dans cette contrée à proximité de la Grèce et de l’Achéron.
Enfin, dans une troisième, appartiennent les œuvres qui sont régies par l’histoire contemporaine de l’Albanie et derrière elle celle du parti socialiste. Récits-cigognes, Le crépuscule des dieux de la steppe introduit Le grand hiver, relation sur le mode romantique et tragique de la rupture albano-soviétique, qui annonce Le concert, récit de la rupture avec la Chine.
À côté de cette classification tripartite majeure, Kadaré fait successivement œuvre d’ethnologue dans Avril brisé et de rhapsode pour Qui a ramené Doruntine ? et Le pont aux trois arches. Deux légendes, « Constantin et Doruntine », « La construction du château de Rozafa », et le Kanun[17], droit coutumier oral qui a régenté la vie et la mort des Albanais pendant des siècles, servent de matériau à l’auteur afin de démontrer comment par sa solidité la culture albanaise a pu survivre malgré une multitude d’occupants, et comment par sa souplesse sa langue s’est maintenue contre les impuretés des étrangers. La bessa, parole donnée, concept clé, hante les légendes et l’ancien droit coutumier.
Sans m’attarder plus longtemps sur le fonds antique et médiéval des épopées et des légendes, et les rites archaïques de passage de Kanun et de bessa dont Ismaïl Kadaré s’est fait l’exégète, je vais essayer de dégager par la suite la mythologie commune des Balkans où a puisé l’auteur, à l’instar des écrivains de la Grèce ancienne, d’Œdipe aux Atrides, de Troie à Trézène et Phèdre.
C’est notamment les œuvres éternelles qui puisent dans un fonds commun à l’ensemble des Balkans et de l’Europe. Le mythe de la femme emmurée dans la citadelle de Rozafa, appartient non seulement à la mémoire collective albanaise, mais aussi grecque, yougoslave, roumaine, et hongroise. Le thème de l’emmurement est développé dans Le pont aux trois arches, où le narrateur évoque la légende des trois frères, constructeurs d’une citadelle. La femme de l’un d’eux est emmurée dans les fondations pour assurer la pérennité d’un édifice, régulièrement mis en bas d’une façon mystérieuse. Cette légende dans le roman, sert de couverture et de prétexte à des crimes réels à l’instigation du maître d’œuvre du Pont. Elle est reproduite à plusieurs reprises dans le cycle épique albanais : Ballade de Rozafa, emmurée dans la forteresse de Skhodër, ou celle du Pont d’Arta, en Epire. Ivo Andric l’a utilisée dans son œuvre la plus célèbre, Il est un pont sur la Drina (Plon, 1956). Par ailleurs, « Le lait de la mort », l’une des nouvelles orientales de Marguerite Yourcenar, apparaît aussi comme l’incarnation du mythe. Yourcenar situe sa nouvelle près de la ville de Shkodër, en Albanie du Nord et elle met en relief le caractère balkanique de cette ballade :
Mais les paysans serbes, albanais ou bulgares ne reconnaissent à ce désastre qu’une seule cause : ils savent qu’un édifice va s’effondre si l’on n’a pas pris soin d’enfermer dans son soubassement un homme ou une femme dont le squelette soutiendra jusqu’au jour du jugement dernier cette pesante chair des pierres[18].
La deuxième ballade qui a inspiré Kadaré et d’autres écrivains des Balkans est celle de Constantin et Doruntine. C’est le cas de l’écrivain albanais Besnik Mustafaj, auteur de la nouvelle « Un été sans retour »[19]. Dans Le pont aux trois arches, Constantin, sortant de sa tombe, ramène à la maison familiale, en une pérégrination miraculeuse et macabre, sa sœur, mariée, dans une contrée lointaine et dont leur mère réclame impérieusement la présence. Cette ballade apparaît aussi dans le Crépuscule des dieux de la steppe, où un étudiant albanais, séjournant en URSS, la raconte à la jeune fille dont il est amoureux. Le sujet prend une dimension remarquable dans Qui a ramené Doruntine ?, où le capitaine régional Stes mène son enquête en usant à la fois des procédures cruelles de son époque médiévale et des méthodes rigoureuses d’un policier moderne, introduit une sorte de mécanisme rationnel dans un monde de mystère et de surnaturel.
En modernisant les mythes, Kadaré devient mythe lui-même. L’auteur prend les mythes et les légendes et les élève au rang de symbole. Réincarnés successivement à diverses époques, les mythes deviennent lois de l’histoire. Toutefois, l’originalité de Kadaré est qu’il croise le fer avec les autres peuples des Balkans afin de défendre la thèse de la paternité de l’Albanie sur les deux grandes légendes « Constantin et Doruntine » et « La construction du château de Rozafa ». Le narrateur albanais du Crépuscule des dieux de la steppe est formel : « J’ajouterais que tous les peuples des Balkans avaient créé des variantes à cette légende, qu’elle ne devait pas me prendre pour un chauvin, mais que la nôtre était vraiment la plus émouvante, la plus belle »[20].
Si l’écrivain albanais est inextricablement lié aux écrivains Balkans par la typologie du mythe, il l’est aussi par les racines historiques qui unissent une cohorte d’œuvres balkaniques. Grèce, Bulgarie, Yougoslavie et Albanie ont subi l’occupation ottomane et la mémoire collective reste fort imprégnée. En Yougoslavie, Ivo Andric a utilisé aussi le thème des massacres de dignitaires invités par les dirigeants ottomans soucieux d’éclaircir les rangs de leurs adversaires potentiels. Ces drames de l’histoire, réincarnés dans la nouvelle « La commission des fêtes » chez Kadaré et dans « L’éléphant du vizir » chez Andric, sont de terribles violations de la bessa, qui veut que les invités soient sous l’entière protection des maîtres des lieux.
À l’instar de Kadaré dans La niche de la honte, Andric évoque comment la Porte sublime faisait supprimer quand bon lui semblait certains de ses illustres serviteurs, devenus gênants ou l’aillant failli. Mais le plus grand parallélisme c’est que les deux écrivains Balkans, mettent au centre de leur œuvre l’homme et l’histoire. Issus de mondes profondément ruraux, ils situent leurs œuvres dans des villages ou de petites villes et excellent à décrire des microcosmes humains. La chronique de Travnik et les gens d’Osatilitsa sont les pendants slaves de la Chronique de la ville de pierre.
On trouve également une analogie entre Kadaré et le Suédois d’origine grecque Théodore Kallifatides. Son roman à succès Santons du Péloponnèse évoque l’occupation et la résistance dans un microcosme villageois sur le même ton tragi-comique que la Chronique de la ville de pierre de Kadaré. Je voudrais signaler aussi les exemples des écrivains grecs Dimitris Hadzis[21] et Kostas Tachtsis[22], chez qui les évènements historiques récents ramenés à leur perception populaire ont imprégné la littérature balkanique. Il est assez frappant de constater que le peuple grec qui a inventé la tragédie tout comme les peuples qui l’ont véhiculée longtemps grâce à leurs rhapsodes (Albanais, Monténégrins, Roumains) ont traversé au XXe siècle des événements tragiques dans lesquels un Eschyle ou un Sophocle auraient trouvé sans doute matière à écrire une multitude de drames. Démembrements d’États, ablation de contrées sous le scalpel des grandes puissances, guerres civiles, famine, purges et trahisons, complots, séismes : l’Enfer a fait des Balkans du XXe siècle l’une de ses plus belles vitrines.
Les tambours de la pluie relate le siège d’une citadelle dont les Turcs ne réussissent pas à se rendre maîtres. Dans la lignée de Barleti, écrivain albanais du XVIe siècle qui a exalté dans Le siège de Shkodër la résistance des Albanais contre l’empire ottoman, Ismaïl Kadaré exalte le mythe de la résistance, cher à la littérature balkanique qui a su se faire l’écho des luttes et des souffrances des peuples de la région. La portée symbolique de Tambours de la pluie sur l’Albanie inexpugnable est reprise dans Le grand hiver. L’histoire se répète et les hommes imitent leurs ancêtres. Voilà la théorie des cycles de la civilisation reprise par Kadaré faisant d’elle l’assise de ses romans. Avril brisé, œuvre intemporelle par excellence pourrait bien se situer au Moyen-Âge en Albanie qu’à d’autres endroits de la Méditerranée à d’autres époques, est l’exemple le plus manifeste de se placer hors du temps classique.
Il n’y a pas de temps pour Kadaré, ou plutôt l’espace est intemporel chez lui. L’imaginaire des Grecs anciens a mis au monde les mythes et les rêves les plus actuels. Eschyle demeure toujours moderne. « Les palais des Atrides sont aujourd’hui plus nombreux que jamais dans le monde. Le Kremlin ou le Vatican, le palais des Borgia ou le palais d’hiver, des dizaines de palais ou demeures dont les murs ont vu ou entendu des crimes à faire frémir le monde entier, attendent encore leur Shakespeare ou leur Eschyle »[23]. Curieusement, Ismaïl Kadaré se demande dans Eschyle ou l’éternel perdant : « Serait-il bon ou non d’avoir trois Macbeth ?[24] […] Posséder trois Macbeth serait vraisemblablement inutile. Si cela, toutefois, n’apparaît pas certain à tout le monde, chacun, en revanche, s’accordera sur un point : en posséder dix serait une catastrophe »[25].
Si l’homme ne naît pas mystérieux, pour rappeler les propos de Eric Faye (Faye, 1996:124), c’est la société qui lui inculque le goût du secret, et celle où l’auteur a passé quarante-cinq ans de stalinisme. Comme le narrateur du Terrier de Kafka, Kadaré a foré de multiples galeries pour semer ses poursuivants et rester lui-même à l’intérieur de la citadelle des Tambours de la pluie. Kadaré fait corps avec l’histoire et écrit la mémoire collective de son pays.
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Dans le patrimoine littéraire mondial, Kadaré œuvre pour une littérature transversale et transnationale au service de l’humanité. Qu’il s’agisse des aèdes grecs, d’Eschyle ou du Kanun, Kadaré fait du fond mythique grec et balkanique la matrice textuelle des ses œuvres. Si son œuvre littéraire se veut de prime abord une fiction historico-mythique, l’auteur fait finalement œuvre intemporelle. Le présent n’est qu’un curseur de déplacement sur un grand écran.
Penseur des Temps modernes, Kadaré est tenté par les mythes. En modelant et en modernisant les mythes grecs, il leur donne une résonance contemporaine. Sartre a retravaillé la matière de l’Orestie dans Les mouches, et Giraudoux dans Electre. Kadaré ne s’est pas lancé dans la réécriture des œuvres eschyléennes à proprement parler, mais a relevé le défi.
Kadaré se pose sans conteste le légataire des auteurs des tragédies grecques, et notamment d’Eschyle, leur chef de file. Vingt-cinq siècles plus tard, ses tragédies ont nourri et influencé la pensée et l’œuvre de l’écrivain albanais. Assoiffé de justice, l’écrivain grec a posé face aux vengeances de sang qui frappaient les Atrides « la question de savoir quel ‘droit’ doit régner dans la société humaine ‒ celui que dictent les impératifs du sang ou celui qui se fonde sur l’ordre étatique », explique Kadaré[26]. Le même dilemme apparaît dans Avril brisé où la vendetta et le Kanun ont force de loi. Kadaré déplore la carence d’État de droit dans cette Albanie des années 30 devenue une gigantesque Mycènes régie par un enchaînement de crimes sans fin. Payant les horreurs commises par son père Atrée, Agamemnon est tué par sa femme Clytemnestre secondée par Egisthe, puis Clytemnestre paie à son tour son meurtre sous les coups de son fils Oreste, lui-même menacé de vengeance et poursuivi par les Erinyes.
Eschyle hante véritablement Kadaré, tout comme Le grand hiver et Le concert où une minuscule nation tient tête aux grandes puissances, alors que Les sept contre Thèbes ne laissent pas de rappeler Les tambours de la pluie.
Dans Avril brisé, Kadaré marque son hostilité à l’égard de la vendetta albanaise. Une vendetta existait déjà en Grèce pendant la période mycénienne, d’où la similitude avec l’Orestie, et de manière générale le mythe d’Electre. Il est significatif de voir que le constat que fait Kadaré de l’Albanie du Nord dans les années 30 est pratiquement le même que celui d’Eschyle à propos d’une Grèce d’il y a trois mille ans. Il y a eu pourtant Solon, qui naquit un siècle avant Eschyle, législateur, homme d’État grec, poète et philosophe, qui jeta les bases d’un nouveau cadre juridique instituant l’héliée, tribunal populaire qui jugeait la plupart des affaires criminelles.
Mais si Eschyle fascina Kadaré, c’est surtout le mythe de Prométhée qui attira au plus profond de lui Kadaré, parce que l’affrontement n’était plus entre hommes comme chez les Atrides, mais entre divinités. Prométhée enchaîné, autre symbole du droit, demeure plus que jamais moderne. Selon Marx, Prométhée « premier martyr du calendrier philosophique » demeure emblématique de la lutte des opprimés contre les dominants, et selon Kadaré, « à la différence de certains héros de l’Antiquité, le temps ne l’a pas éloigné des hommes »[27].
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La Grèce ancienne est l’avenir de l’homme ? En tout état de cause, comme le rappelle Kadaré, la tragédie grecque est la pus récente de toute pièce contemporaine[28].
Tout comme la cosmogonie hellénique fait naître le monde des dieux et des hommes d’un chaos initial, l’Albanie vit dans le désordre ottoman où triomphe le mensonge, et où les plus maléfiques permettent aux hommes d’assouvir leurs appétits de puissance, leurs instincts de domination. Nous sommes au seuil de l’intolérance, du rejet de l’autre. Pour Kadaré, l’empire ottoman représente l’enfer sur terre. Ce monde des crimes et de sang n’est pas infernal dans sa seule apparence, mais dans son principe fondateur. « L’enfer est le commencement des lois, de la légitimité… Le concept de droit commence par l’enfer »[29], déclare curieusement l’auteur.
Au seuil des pays des Balkans, l’Albanie c’est l’autre monde, le monde qui résiste, le dernier carré qui ne se rend pas. Tout l’optimisme de Kadaré est là.
Dans la préface à La Ville du Sud, recueil de nouvelles, Robert Escarpit écrit :
Le pessimisme d’Ismaïl Kadaré n’est qu’apparent. Le monde qu’il évoque (le plus souvent celui de l’Albanie en lutte) n’est pas facile : il est semé de problèmes, de chagrins, parfois de cruautés. Mais c’est un monde où l’individu écrasé retrouve sa force de vivre et d’agir au contact de la terre natale et où son esprit[30] de résistance ne meurt jamais.
Cette terre natale, terre sauvage et rude, comme ses habitants, est aussi celle des premières colonies grecques dont Homère a immortalisé les aventures. Cette terre si particulière était connue des Grecs qui fondèrent sur les rivages de la Méditerranée les premières cités libres. Mais plus qu’aux Grecs c’est aux Troyens qu’Ismaïl Kadaré accorde sa préférence : on ne peut pas être contre eux[31].
Inutile d’insister sur tout ce que symbolise la lutte des Troyens face à l’impérialisme des anciens Grecs. Il faudrait plutôt noter que l’histoire de la prise de Troie n’est pas dans l’esprit de Kadaré une histoire passée et révolue. Au contraire. Elle lui permet de dire qu’il partage la conception, très poétique, du temps chez Aristote : « Les événements de Troie me sont antérieurs, mais ils pourraient avoir lieu maintenant ou plus tard ; c’est un hasard si l’événement nous est antérieur. Tout dépend des engrenages du temps »[32].
Une nation est une âme. Grâce aux mythes, et à l’Histoire, la destinée humaine prend un sens, un lien s’établit entre les morts, les vivants et les générations à venir. Si l’Histoire sert de toile de fond à la plus grande partie de l’œuvre de Kadaré, les mythes tissent ses œuvres d’un bout à l’autre dans une dynamique intemporelle. Chantre de l’Albanie, Kadaré devient en même temps défenseur de l’Europe des patries.
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On ignore ce qu’aurait été la littérature mondiale sans Eschyle, dit Kadaré[33]. On ignore ce qu’aurait été la littérature albanaise sans Kadaré. Eschyle hybride, moitié lumière, moitié ombre éternelle. Il incarne le monde tel que le présentaient les Grecs. Avec la lumière de la vie mêlée aux ténèbres de l’enfer. Comme Kadaré. Et son œuvre. Inséparable de l’histoire. Il ne peut y avoir d’étude sur Eschyle sans prendre en compte le côté sombre qui caractérise le tragique grec. Il ne peut y avoir d’étude sur l’Albanie sans Kadaré et sa saga balkanique, véritable témoignage du drame qu’a vécu la moitié de l’Europe dans le second XXe siècle.
Dans la littérature moderne et post-moderne des Balkans en général et de l’Albanie en particulier, Kadaré fait figure de proue, en bafouant les tyrans, en fustigeant les meurtres perpétrés.
Prométhée des Temps modernes, Kadaré va à l’encontre des démagogues et fait une œuvre à contre-courant des mentalités et des régimes.
Mythe des Balkans, mythe du pays oppressé et opprimé, Kadaré se bat sa vie durant pour la liberté ‒ liberté de culte, liberté politique, liberté de la presse et fin du monopole du Parti sur l’État ‒, et le pluralisme politique. Écrivain catalyseur, il œuvra pour la chute du stalinisme. Écrivain mythe, il écrit l’histoire de son Albanie éternelle, enfin libre et rétablie et fait de son œuvre une véritable mytho-poésie des Balkans.
Bibliographie
BRUNEL, Pierre, Mythopoétique des genres, Paris, PUF, « Écriture », 2003.
BRUNEL, Pierre, Mythocritique. Théorie et parcours, Paris, PUF, « Littératures », 1992.
ELIADE, Mircea, Images et symboles, Paris, Gallimard, coll. Tel, 1979.
FAYE, Éric, « Ismaïl Kadaré : un sphinx en hiver », in Albanie Utopie. Huit clos dans les Balkans, Autrement, Sonia Combe et Ivaylo Ditchev (Éds), collection Monde, hors série, N° 90, janvier 1996, p. 124-137.
FAYE, Éric, Ismaïl Kadaré. Prométhée porte-feu, Paris, José Corti, 1991.
KADARÉ, Ismaïl, Entretiens avec Éric Faye, Paris, José Corti, coll. « En lisant en écrivant », 1991.
KADARÉ, Ismail, Le crépuscule des dieux de la steppe, Paris, Folio, Gallimard, 1989.
KADARÉ, Ismaïl Eschyle ou l’éternel perdant, traduit de l’albanais par Alexandre Zotos, Paris, Fayard, 1988.
KADARÉ, Ismail, Invitation à un concert officiel et autres récits, Paris, Fayard, 1985.
OKTAPODA-LU, Efstratia (Éd.), Francophonie et multiculturalisme dans les Balkans,
Introduction de Pierre Brunel, Paris, Publisud, 2006.
ROUGEMONT, Denis, Les Mythes de l’amour, Paris, Albin Michel, 1961 (rééd. Gallimard, coll. « Idées », 1972).
SINANI, Sheban, Le Dossier Kadaré. Suivi de La vérité des souterrains, entretien d’Ismaïl Kadaré avec Stéphane Courtois, Traduit de l’albanais par Tedi Papavrami, Paris, Odile Jacob, 2006.
SHEHU, Bashkim, L’Automne de la peur, Paris, Fayard, 1993.
YOURCENAR, Marguerite, « Le lait de la mort », Nouvelles orientales, Paris, Gallimard, L’imaginaire, 2005.
Notes
[1] Cette étude a fait l’objet d’une Conférence lors du Colloque international Les Écrivains du Sud-Est européen en quête d’identité, à l’Université “Spiru Haret”, Bucarest, 6-7 novembre 2009.
[2] Denis Rougemont, Les Mythes de l’amour, Paris, Albin Michel, 1961 (rééd. Gallimard, coll. « Idées », 1972, p. 25
[3] Pierre Brunel, Mythocritique. Théorie et parcours, Paris, PUF, « Littératures », 1992, p. 46-47.
[4] La bessa est la règle fondamentale du Kanun, une notion complexe où se retrouvent la loyauté, la garantie, la fidélité à la parole donnée, le respecte du contrat.
[5] Sheban Sinani Le Dossier Kadaré. Suivi de La vérité des souterrains, entretien d’Ismaïl Kadaré avec Stéphane Courtois, Traduit de l’albanais par Tedi Papavrami, Paris, Odile Jacob, 2006, p. 196.
Par ailleurs, l’auteur avoue : « J’ai remis à mon éditeur, Claude Durand, la carte du goulag albanais ainsi que des informations sur les prisonniers politiques, qu’il publia sous pseudonyme dans la presse française. Avec une lettre remise au Président américain par les soins de mon ami Elie Wiesel, c’est bien la totalité de mes actions dans ce domaine ». Voir Sheban Sinani, Le Dossier Kadaré, op. cit., p. 196. Et il ajoute plus loin : « [L]a foi en la littérature, le processus de création, apportent la protection. Ils secrètent des anticorps permettant de lutter contre la terreur de l’État. […] de tous les dangers […] seule la rupture avec la littérature serait véritablement fatale à l’écrivain ». S. Sinani, op. cit., p. 202.
[11] Le général de l’armée morte (Albin Michel, 1970) est le premier roman de Kadaré, roman qui le propulsa dans le monde entier alors qu’il n’avait que vingt-quatre ans. Le roman décrit la singulière mission d’un officier italien venu recueillir les dépouilles des soldats tombés sur le sol albanais lors de l’offensive d’avril 1939. Au terme d’une extraordinaire aventure au cours de laquelle il parcourt le pays avec sa liste de l’armée porte sous le bras, le Général comprend que nul envahisseur ne parviendra jamais à soumettre le peuple albanais ni en pénétrer le coutumier.
[12] Efstratia Oktapoda-Lu (Éd.), Francophonie et multiculturalisme dans les Balkans,
Introduction de Pierre Brunel, Paris, Publisud, 2006, p. 16.
[16] Œuvre clé de la production littéraire de Kadaré, Eschyle ou l’éternel perdant porte sur le rapport écrivain-pouvoir politique.
[17] Le Kanun, du grec kanôn, règle, rival dans l’Histoire du Nomokanon byzantin et du droit ottoman et qui a gardé son emprise jusqu’au début du XXe siècle dans les montagnes de la zone épique. « Le Kanun est une richesse universelle devant laquelle le Code d’Hamourabi ou les autres législations de ces zones-là ressemblent à des jouets d’enfant […] C’est pour cela qu’il est vain de se demander à son sujet, comme des enfants, s’il est bon ou mauvais. Comme toute chose grandiose, le Kanun est au-delà du bien et du mal », écrit Kadaré. Voir Ismaïl Kadaré, Avril brisé, Livre de poche, 1982, p. 74-75.
[18] Marguerite Yourcenar, « Le lait de la mort », Nouvelles orientales, Paris, Gallimard, L’imaginaire, 2005, p. 48.
[19] Besnik Mustafaj, Les lettres albanaises (1990), tout comme Gottfried August Bürger, écrivain allemand du XVIIIe siècle dans Léonore (1774), ou le Russe Vassili Joukovski au XIXe siècle.
[21] Dimitris Hadzis (1913-1981), inscrit dans le parti communiste grec, fut obligé de quitter la Grèce après la guerre civile et de s’exiler à Berlin et à Budapest. Il ne retourna en Grèce qu’en 1974, après la chute du régime des colonels. Il est l’auteur d’un recueil de nouvelles, La fin de notre petite ville (Bucarest, 1952, en grec). Il est plutôt connu avec le roman Le livre double, 1976 (en grec) qui relate la vie des émigrés grecs en Allemagne.
[22] Kostas Tachtsis (1927-1988), auteur principalement du Troisième anneau (1962, en grec), chef d’œuvre de la prose grecque de l’après-guerre qui relate la guerre des Grecs en Macédoine et l’Occupation.
[23] Ismaïl Kadaré, Eschyle ou l’éternel perdant, traduit de l’albanais par Alexandre Zotos, Paris, Fayard, 1988, p. 121.